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vendredi 27 avril 2018

Une lecture obligatoire pour tous nos élus



    Rapport Borloo 

    les 19 pistes à creuser 

    pour réduire enfin les 

    inégalités

Dans son rapport ambitieux, il appelle à une meilleure affectation des moyens alloués aux banlieues.




«L’heure est à l’action.»

C’est sur ces propos combatifs que s’ouvre le très attendu rapport sur la politique de la ville, remis jeudi à Edouard Philippe par Jean-Louis Borloo.
Ministre de la Ville sous Jacques Chirac, ce dernier s’était vu chargé par Emmanuel Macron, mi-novembre, de proposer un nouveau plan d’action en faveur des quartiers défavorisés.
Espéré avec ferveur par les élus et les associations locales, il ne propose rien de moins qu’une «réconciliation nationale» entre la République et ses banlieues.
«Après des mois de travail […], je dois avouer ma stupéfaction d’avoir découvert à quel point le système était désinvolte et se mentait à lui-même, écrit -il.
Non seulement les moyens déployés dans les quartiers appelés prioritaires sont en dessous du minimum républicain mais, plus grave, les correctifs mis en place se sont quasiment tous arrêtés.»

«Relance immédiate» des chantiers urbains

L’ancien ministre, qui fulmine régulièrement contre «les petits hommes gris de Bercy» qui méconnaissent les dures réalités auxquelles font face les élus et les associations présentes sur le terrain, dénonce aussi «un problème majeur dans l’affectation des moyens intellectuels et financiers de l’Etat». Les préconisations du rapport se répartissent en 19 plans d’action : qualité urbaine, mobilité, éducation, emploi, sport… Les plus spectaculaires consistent en la création de nouvelles institutions. Comme celle d’une «nouvelle grande école», baptisée «l’académie des leaders» et destinée à favoriser l’ascension sociale de jeunes «à très haut potentiel» issus des quartiers. Ceux-ci seraient sélectionnés sur concours et rejoindraient de prestigieux cursus tels que l’ENA, HEC ou la Sorbonne, avant d’intégrer la haute fonction publique.
Autre structure réclamée par le rapport : une «cour d’équité territoriale», devant laquelle «chaque responsable public devra prouver, chiffres à l’appui, qu’il a mis en œuvre les moyens susceptibles de contribuer à réduire les inégalités d’accès aux services publics».
L’organe pourrait «condamner tout gestionnaire public ayant failli à l’obligation de moyens qui s’impose à lui pour contribuer à l’équité territoriale […] ou fait obstruction à sa mise en œuvre».
En matière de rénovation urbaine, Jean-Louis Borloo souhaite «une relance immédiate» des chantiers et la création d’une «fondation appartenant à la nation», dotée de moyens «considérablement renforcés» par rapport à l’actuelle Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru).
Lancée sous son égide en 2004, celle-ci connaît aujourd’hui «une forme d’immobilisme», a reconnu son Président O KLEIN maire (PS) de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), emblématique de la politique de la ville.
Or «la qualité urbaine est décisive [pour les habitants des quartiers prioritaires, ndlr], dit le rapport.
Seuls les gens qui n’y vivent pas opposent l’humain à l’urbain».
Aujourd’hui, 400 projets de rénovation «parfaitement identifiés» sont enlisés.
Pour donner un nouveau souffle et faire revenir les grues dans les quartiers, «cette fondation bénéficierait de l’affectation irréversible de fonds et d’actifs d’Action logement», qui possède 988 000 logements sociaux ou intermédiaires au travers d’une multitude de sociétés de HLM qu’il contrôle et dispose de 3,4 milliards d’euros de ressources annuelles.

«Mobilité équitable» et «cités éducatives»

L’amélioration du cadre de vie des habitants des quartiers passe aussi par la question de la mobilité, «vitale» pour trouver plus facilement un emploi, aller travailler, se soigner, ou tout simplement sortir de son univers quotidien.
Or dans les territoires défavorisés, il y a moins de transports en commun, moins de gens qui ont des voitures, moins de personnes détentrices du permis de conduire (seulement 25 % chez les femmes).
L’absence de mobilité est l’une des composantes d’«une forme de relégation» dans laquelle vivent «près de 6 millions d’habitants».
Le rapport désigne les intercommunalités comme des acteurs majeurs devant garantir «la mobilité pour tous de manière équitable».
Il préconise aussi plusieurs mesures spécifiques pour améliorer la desserte des «quartiers prioritaires de la politique de la ville» en Ile-de-France (1,5 million d’habitants).
Ancien maire de Valenciennes, Jean-Louis Borloo plaide également pour la création, dans les quartiers prioritaires, de «cités éducatives». Celles-ci reposeraient sur la mise en réseau, sous l’égide du principal de collège, «de tous les lieux et de tous les acteurs prêts à soutenir, ensemble, l’éducation des enfants» : écoles, associations, médiathèques, centres de loisirs…
Les chefs d’établissement concernés bénéficieraient d’une autonomie accrue et de financements supplémentaires.
Jean-Louis Borloo propose par ailleurs de doubler le taux d’encadrement des élèves dans 8 000 classes de maternelle et de reconstruire ou rénover 300 écoles et 100 collèges dans les quartiers en difficulté.
Le rapport évoque enfin un petit-déjeuner et un déjeuner gratuits dans les écoles et collèges classés «éducation prioritaire».
En matière d’enseignement supérieur, Borloo préconise la création de 200 «quartiers d’excellence numérique» dotés de «campus numériques» : de «vastes lieux […] permettant au plus grand nombre un accès total, via les outils les plus innovants, à une offre de services complète et clairement identifiée : formation, emploi, services publics, culture, aide aux juniors, bénévolat».
Le service doit notamment «faire exploser le nombre d’étudiants à distance» dans les quartiers. Sur le front de l’emploi, l’ancien ministre prône un plan massif visant à former et à orienter 100 000 habitants des quartiers vers les services à la personne.
Il souhaite aussi renforcer l’engagement des entreprises en matière d’apprentissage, au besoin de manière contraignante.

«Reconquête» de l’espace public

Constatant l’importance des femmes dans la vie des quartiers et dans le maintien de la paix sociale, Jean-Louis Borloo veut faire «penser les équipements publics pour un usage par les femmes».
Dans chaque quartier prioritaire serait définie «une stratégie d’occupation de l’espace public par des adultes, femmes et hommes, habitants comme professionnels, pour engager la reconquête et repousser ceux qui veulent s’approprier l’espace comme symbole d’un pouvoir ou pour des trafics».
Le rapport vise aussi la création de 30 000 places de crèche dans les mêmes quartiers.
En matière de sécurité, il propose de modifier les règles de rémunération pour fidéliser les policiers les plus expérimentés, de poursuivre le développement de la vidéosurveillance et de recruter de nouveaux magistrats.
Et alors que beaucoup d’élus protestent contre les restrictions budgétaires demandées par l’Etat, le rapport plaide pour un allégement de la contrainte sur les villes classées «rénovation urbaine», qui pourraient augmenter leurs dépenses de fonctionnement de 2 % par an, contre 1,2 % en moyenne pour les autres grandes collectivités.
Un fonds d’urgence pour l’investissement de ces communes serait créé et doté de 500 millions par an.
Le rapport évoque enfin une multiplication des «testings» pour combattre les discriminations à l’embauche et encourage le «name and shame» vis-à-vis des entreprises fautives.



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