Éducation
Le
Mammouth a la peau bien
tendre...
La publication
annuelle du bilan social du
Ministère de l'Éducation Nationale
permet de
plonger dans le quotidien des 846.000
enseignants français.
De
quoi avoir des notions précises concernant,
leurs horaires de
travail, leur absentéisme en
passant par leurs salaires.
En moyenne 35,6 jours, dans
la lignée de la fonction publique
Les
enseignants seraient trop souvent absents.
C'est
ce qu'affirment les parents d'élèves, dont les fédérations
représentatives, comme la FCPE, ont pris l'habitude de recenser ceux
qui n'étaient pas remplacés, parfois pendant de longues semaines…
On
ne compte plus les lettres de protestation indignées dans les
rectorats face à l'absence d'un professeur de mathématiques ou
d'anglais.
Contrairement
à d'autres professions, l'absence d'un professeur est ressentie par
plus d'une trentaine de familles.
L'effet
de loupe est dévastateur…
Durant
l'année scolaire 2011-2012, 44,4 % des personnels ont pris au moins
un congé pour raisons de santé, d'une durée cumulée moyenne de
35,6 jours .
Cette
durée moyenne recouvre des congés pour maladie ordinaire
essentiellement, mais aussi maternité, paternité, adoption,
accident du travail, longue maladie, etc.
La
moitié des personnes arrêtées a pris moins de six jours sur
l'année scolaire 2011-2012.
Le
fait d'enseigner en zone d'éducation prioritaire (ZEP), là où les
élèves sont les plus défavorisés et où se concentrent les
problèmes de violence et d'autorité entraîne davantage de congés
maladie.
Les
enseignants affectés en collèges ou lycées de ZEP sont ainsi 50 %
à avoir posé au moins un jour de congé maladie, contre 42 % dans
des collèges et lycées ordinaires.
La
différence est marquée pour les congés de maladie ordinaire mais
aussi pour les congés de maternité puisque les enseignants affectés
dans ces établissements sont plus jeunes…
Peut-on
en conclure que les enseignants sont plus absentéistes que dans le
reste de la fonction publique?
«Absolument
pas. Ils ne le sont ni plus ni moins que les autres».
Les
comparaisons sont d'autant plus hasardeuses que plus de 70 % des
enseignants sont des femmes, plutôt jeunes.
Elles
cumulent donc davantage de congés maternité comme les salariés du
privé et les autres fonctionnaires.
De
fait, selon les rares études sur le sujet, et si l'on ne compte pas
les congés maternité, Ce sont les policiers qui dans la fonction
publique comptaient le plus grand nombre d'arrêts maladie
«ordinaires», devant les agents des ministères de la Défense, de
la Justice, de l'Équipement, de l'Emploi et de la Solidarité. Les
enseignants arrivaient ensuite.
●
Temps de travail: un tiers
des heures s'effectuent à la maison
Calés
sur le rythme de leurs élèves, les enseignants bénéficient de 2.5
jours de congés payés par mois travaillés .
Ce
qui correspond aux petites vacances scolaires.
Les
salariés prennent en moyenne un peu plus de SIX semaines de congés
payés ou de réduction du temps de travail.
Ils
dispensent 24 heures de cours hebdomadaires à l'école, et entre 15
et 18 heures au collège et au lycée selon qu'ils sont titulaires du
concours de l'Agrégation ou du Capes.
Cela
suffit-il pour les traiter de privilégiés, comme on l'entend
souvent?
La
réalité est très variable selon le statut de l'enseignant, son âge
ou sa discipline.
Il
est d'autant plus difficile de l'appréhender que les seules données
existantes sur leur temps de travail reposent uniquement sur leurs
déclarations via l'Insee.
Pendant
l'année scolaire, un enseignant du premier degré déclare, en
moyenne, 44 heures de travail par semaine, dont 25 h 30 en présence
d'élèves.
Le
reste se répartit en préparation des cours, corrections des copies,
réunions ainsi que surveillance d'études ou de cantine.
Encore
faut-il préciser que les enseignants de maternelle (38 h 30)
déclarent moins d'heures qu'un enseignant de primaire (43 heures).
Logique:
Ils n'ont pas de correction des copies en maternelle ni d'heures
d'études…
Dans
le second degré, un enseignant déclare en moyenne 41 heures de
travail par semaine.
À
une heure d'enseignement correspond au moins une heure de travail en
dehors. Les professeurs de disciplines littéraires, eux, annoncent
un peu plus d'heures de corrections et de préparation de cours que
leurs homologues scientifiques ou que les professeurs de langues.
Une
dissertation serait plus longue à lire qu'un devoir de
mathématiques. Les professeurs de sport, de dessin ou de musique,
eux, amènent peu de travail à la maison.
Le
temps moyen de travail ne reflète d'ailleurs pas la variabilité des
déclarations: un enseignant sur dix déclare moins de 9 heures de
travail en dehors des heures de cours et un sur dix déclare plus de
35 heures!
Contrairement
aux idées reçues, les enseignants peuvent travailler pendant les
« vacances de leurs élèves» : Ils ont comme tous les
salariés 2.5 jours des congés annuels par mois travaillés.
Ils
travaillent sur l'année 8 jours pendant l'été et un jour et demi
par semaine pendant les autres vacances scolaires.
Enfin,
à chaque âge suffit sa peine.
Si
les plus jeunes déclarent un volume horaire assez élevé avec plus
de 45 heures par semaine, un creux s'observe pour les 30-34 ans avec
un temps de travail inférieur de 8 heures.
Cette
différence se situe surtout sur le temps de préparation de cours
extrêmement élevé (plus de 10 heures par semaine pour les jeunes)
sans doute lié à un «coût d'entrée» dans le métier
d'enseignant.
Une
fois élaborés et rodés, les cours, même améliorés et modifiés
au fil des années, prennent moins de temps.
●
des salaires sur 12 mois:
de grandes inégalités
Selon
les données de l'Éducation nationale, le portrait-robot de
l'enseignant lambda est celui d'une femme, âgée entre 30 et 50 ans.
En
collège et lycée, elle gagne en moyenne 2459 euros net par mois,
2123 euros si elle officie à l'école primaire.
Ces
salaires paraissent relativement faibles car ils sont annualisés par
rapport à celui des salariés français au même niveau d'études
(bac + 5), mais les enseignants ont le desavantage d'être des
fonctionnaires…a mi-temps.
D'après
les comparaisons internationales, les enseignants français gagnent
en moyenne 20 % de moins que leurs homologues du reste de l'OCDE.
Surtout,
les professeurs des écoles atteignent à peine 1500 euros en tout
début de carrière.
Un
enseignant allemand, par exemple, touche le double.
Mais
à l'étranger, les enseignants sont souvent tenus d'être présents
plus longtemps au sein des établissements et ils ne bénéficient
pas de la même sécurité de l'emploi que les Français…
Enfin
avec l'avancement à l'ancienneté quasi automatique dont ils
bénéficient, les Français atteignent en fin de carrière les
salaires de leurs collègues européens.
Les
différences de statuts sont en revanche énormes en France. Ceux qui
travaillent dans l'enseignement secondaire ont ainsi la possibilité
d'effectuer des heures supplémentaires qui arrondissent leur
salaire.
En
fin de carrière, un agrégé touche 4000 euros en moyenne et jusqu'à
4700 euros.
Un
professeur de chaire supérieur en classe préparatoire peut toucher
jusqu'à 7000 euros.
Le
professeur des écoles, lui, ne dépassera jamais 3000 euros.
●
Des départs à la retraite
qui s'échelonnent de 57 à 61 ans et demi
Les
enseignants du second degré sont en moyenne âgés de près de 61
ans et demi lors de leur départ à la retraite.
La
différence est mince par rapport au privé (62 ans). Et ils partent
plus tard que dans le reste de la fonction publique. Les enseignants
du premier degré qui ont, pour la plupart, eu le statut
d'«instituteurs» pendant au moins quinze ans de carrière
bénéficient en revanche à ce titre de la possibilité de partir de
manière anticipée, cinq ans avant les autres.
Ceci
explique qu'ils soient en moyenne âgés de seulement 57,8 ans au
moment de leur départ.
Cet
avantage va toutefois s'amenuiser progressivement.
Les
ministères de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur
rémunèrent pour le secteur public 771.800 ayants droit retraités.
Un
effectif qui représente plus de la moitié des ayants droit pour
l'ensemble des administrations (52,5 %).
La
pension moyenne de ces retraités s'élève à un peu plus de 2300
euros par mois.
Les
enseignants touchent en moyenne 120 euros de plus.
●
Une profession dévalorisée
qui n'attire plus les meilleurs étudiants
Violences,
difficultés d'apprentissage, hétérogénéité des élèves, la
profession d'enseignant ne ferait plus envie.
Sans
compter des salaires peu attractifs… Selon un sondage réalisé par
la Varkey GEMS Foundation sur la perception du métier, en France,
les enseignants sont comparés à des travailleurs sociaux ou des
bibliothécaires quand les Chinois les assimilent à des médecins!
De
fait, la profession n'attire plus les meilleurs étudiants dans
certaines disciplines.
Le
fait que des centaines de candidats aux concours de professeurs ont
eu cette année un zéro éliminatoire, interroge !
Les
résultats du concours exceptionnel du capes promettent de leur côté
une pénurie de professeurs en mathématiques, anglais, lettres.
La
moitié des postes en maths n'ont pas été pourvus, faute de
candidats au niveau.
Cette
«session exceptionnelle» offrait 1592 postes en mathématiques.
Seuls 793 des 2529 étudiants s'étant présentés ont réussi les
épreuves.
Certes,
ce concours «exceptionnel» a été ouvert pour augmenter le nombre
de profs. Additionné au concours «classique», ils seront en fait
plus nombreux par rapport à 2013.
Reste
que le décalage entre le nombre de postes offerts et pourvus dans
certaines disciplines est inquiétant.
C'est
vrai pour les mathématiques, victimes de la concurrence des métiers
d'ingénieurs plus rémunérateurs.
Idem
pour l'anglais. Ces matières manquent depuis longtemps de
professeurs. Mais le problème touche l'ensemble des pays développés.
Les
lettres, elles, peinent à recruter parce que peu d'étudiants
continuent le latin ou le grec en faculté.
Depuis
2010,
le
métier d'instituteur nécessite un judicieux un bac + 5, ce qui a
réduit le vivier de candidats.
Les enseignants se disent
néanmoins
majoritairement satisfaits de leur métier.
D'après un texte de Marie-Estelle Pech,
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